Lorsqu’elle sort de la presse spécialisée (tests de jeux ou ouvrages dédiés), dire la littérature vidéoludique ne nous a pas habitués au meilleur tient de l’euphémisme. Média toujours aussi polémique après tant de décennies, le jeu vidéo a souvent fait couler beaucoup d’encre – Et pas dans le bon sens. Alors lorsqu’un livre intitulé Les dix commandements du jeu vidéo et écrit par un prêtre nous tombe entre les mains, il y a de quoi être un peu inquiet.
Les jeux vidéo pour ma mère
Mais dans un souci d’ouverture, il faut aussi reconnaître au prêtre Bertrand Monnier et à l’éditeur Salvator, une certaine audace. Tout comme le jeu vidéo, l’église catholique souffre d’une perception parfois caricaturale, entre obsolescence et conservatisme. Concilier les deux sujets dans une même écriture demandait donc un certain courage.
Le livre débute sur un constat assumé. Les jeux vidéo tiennent désormais une place important dans le quotidien, en particulier dans celui des plus jeunes. Et cette réalité génère encore autant de peur que d’incompréhension, notamment chez les adultes.
Cette entrée en matière digne d’une chaîne info est pourtant de courte durée. Rapidement, l’ouvrage donne le ton : il va s’agir ici non pas de condamner mais de repenser son rapport aux jeux vidéo. La citation en préface est particulièrement équivoque. « On n’arrête pas de jouer parce que l’on vieillit, mais on vieillit parce que l’on arrête de jouer ».
Les dix commandements sont fournis d’emblée. Ils incluent par exemple l’idée de dé-diaboliser (l’auteur ayant préféré le terme décrisper pour des raisons évidentes) le jeu vidéo, de prendre conscience de cet univers et de ses raisons, ou encore de savoir discerner fuite et escapade. Nous ne sommes pas forcément d’accords avec tout ce qui y est dit (par exemple, forcément « privilégier l’ordinateur à la console »), mais chaque point y est digne d’intérêt.
Mini-thèse biblique, mais positive
Le corps du livre en lui-même est finalement un développement de ces grandes idées. Il commence par une relecture détaillée du pourquoi et du comment, allant parfois assez loin. En reliant le jeu vidéo avec la fuite du réel et la pression de la société de consommation, par exemple. L’auteur n’entend pas non plus sombrer dans la naïveté. Il adresse aussi les axes problématiques tels que le manque de sommeil, la gestion du temps ou l’irritabilité.
Le dernier tiers du livre reprend une pente résolument constructive et positive. Il propose de nombreux axes de réflexion voire de solution : donner du sens, créer du lien, apprécier la diversité culturelle, apprivoiser la complexité et même « parler comme un geek ». L’ensemble tient sur une bonne centaine de pages et se lit très facilement. A nouveau, l’absence de condamnation et de jugement systématique est appréciable.
Les dix commandements du jeu vidéo se veut donc être une approche positive et constructive, une tentative de concilier les mondes et les générations. Un ouvrage éventuellement destiné aux catholiques, mais sûrement pas que. Soyons clairs, si vous êtes sur Air-Gaming, vous n’êtes probablement pas « dans la cible ». Mais votre amie « Bénédicte qui s’inquiète de son ado qui passe trop de temps sur Fortnite », peut-être. Une vraie bonne surprise.
