Manga

Billy Bat par Naoki Urasawa, l’avis

Billy Bat : entre manipulation, mysticisme et récit captivant

Quand on parle de Naoki Urasawa, difficile de ne pas évoquer l’un des plus grands auteurs de mangas contemporains. De Monster à Pluto, en passant par 20th Century Boys, son style est reconnaissable entre mille. Si vous êtes déjà fan, vous connaissez probablement Billy Bat. Mais si ce n’est pas encore le cas, laissez-moi vous en parler.

Billy Bat, c’est une série co-scénarisée par Naoki Urasawa et Takashi Nagasaki, sortie pour la première fois en 2009 au Japon. Elle compte une vingtaine de tomes et est arrivée chez nous en 2012 grâce à Pika Édition. La traduction française, réalisée par Sylvain Chollet, est d’une qualité rare. Il a su respecter les nuances et subtilités de l’œuvre originale, et franchement, on ne peut que le remercier pour ce travail remarquable.


Une histoire au cœur du mysticisme et de la manipulation

Sans trop spoiler, Billy Bat propose un récit à cheval entre le mystique et la manipulation. L’histoire débute dans les années 1940, à une époque où les aventures de Billy Bat, un personnage de dessin animé façon cartoon des années 1920 (vous savez, comme Betty Boop), séduisent les amateurs de bande dessinée. Mais très vite, on découvre que cette chauve-souris n’est pas qu’un simple personnage fictif. Elle devient le fil conducteur d’une intrigue qui s’étend sur plusieurs générations et mêle les grandes pages de l’Histoire à des récits plus personnels.

Ce qui rend Billy Bat si unique, c’est cette chauve-souris mystérieuse qui, parfois, « parle » à certaines personnes et tente d’influencer le cours du monde. Ses intentions ? Parfois bonnes, parfois mauvaises. Mais surtout, ses manipulations vont au-delà de ce qu’on pourrait imaginer, avec des répercussions incroyables sur les personnages et sur des événements historiques majeurs. Et c’est là tout le génie de Naoki Urasawa : nous faire croire que cette chauve-souris est à l’origine de faits bien réels, comme si elle avait manipulé l’Histoire telle que nous la connaissons.


Des personnages familiers, une marque de fabrique d’Urasawa

Lire une œuvre de Naoki Urasawa, c’est un peu comme rentrer chez soi après un long voyage : on retrouve des visages familiers, des expressions connues, et cette impression de terrain connu qui fait tout le charme de ses mangas. Urasawa a cette particularité de reprendre des traits de personnages similaires d’une série à l’autre. Cela pourrait sembler répétitif, mais c’est tout le contraire.

Ses personnages, bien qu’ils puissent se ressembler physiquement, sont toujours placés dans des contextes complètement différents, avec de nouvelles vies, de nouvelles ambitions, et de nouvelles histoires à raconter. Ce qui est fascinant, c’est qu’on a toujours cette sensation de nostalgie lorsqu’on ouvre un de ses mangas. On reconnaît des visages, des expressions, et on s’y attache d’autant plus facilement.

C’est une vraie force dans sa narration. Parce que lorsqu’il arrive quelque chose à l’un de ses personnages, on se sent immédiatement impliqué. Comme si on avait déjà vécu des aventures avec eux dans une autre vie, dans une autre série. Cette familiarité crée un lien émotionnel unique avec le lecteur, un lien que peu d’auteurs réussissent à instaurer avec autant de finesse.

Et ce n’est pas seulement une question de visages : c’est aussi son talent de dessinateur qui entre en jeu. Les scènes qu’il illustre sont complètes, détaillées, et surtout, elles parlent d’elles-mêmes. Pas besoin de longues explications ou de dialogues superflus : on comprend tout de suite ce qui se passe, ce que ressentent les personnages. C’est un style visuel extrêmement efficace et expressif.

Mais cette familiarité a aussi un coût, si l’on peut dire. Certains lecteurs pourraient y voir une forme de redondance. Pourtant, je pense que c’est justement ce qui rend Urasawa unique. Lorsqu’on termine une série, on ressent souvent un petit manque, cette tristesse de devoir dire adieu à des personnages qu’on a adorés. Mais avec Urasawa, ce manque est comblé. En lisant une nouvelle de ses séries, on retrouve cette sensation réconfortante d’être en terrain connu, tout en découvrant des récits entièrement nouveaux.

Et c’est là que réside son génie : il crée un univers où chaque œuvre est unique, mais où toutes semblent connectées par ces personnages qui nous paraissent familiers. C’est cette capacité à nous faire revivre cette nostalgie agréable tout en nous emmenant dans des histoires inédites qui fait que ses mangas restent gravés dans nos mémoires.


Un récit intrigant mais exigeant

Comme souvent chez Naoki Urasawa, l’intrigue repose sur un mélange d’humanité et de tension constante. Les protagonistes, tous liés d’une manière ou d’une autre à Billy Bat, se battent pour sauver le monde (ou ce qu’il en reste). C’est une thématique récurrente dans les œuvres de l’auteur : l’idée que de simples individus peuvent avoir un rôle clé dans la préservation de l’humanité, à la manière de Monster ou 20th Century Boys.

Cependant, là où Billy Bat diffère, c’est dans son traitement mystique. La chauve-souris n’est pas visible par tout le monde, et ses actions, souvent ambiguës, ajoutent une couche supplémentaire de complexité au récit. On découvre progressivement ses incroyables pouvoirs et son influence sur l’Histoire, mais cette montée en puissance se fait à travers des cliffhangers qui ponctuent chaque tome. C’est une marque de fabrique d’Urasawa : cette capacité à nous tenir en haleine tome après tome.

Cela dit, je dois admettre que, contrairement à d’autres séries comme Monster ou 20th Century Boys, Billy Bat m’a un peu moins tenu en haleine. À l’époque où je lisais un tome tous les deux ou trois mois, je prenais plaisir à retrouver l’histoire, mais je n’étais pas totalement obsédé par l’envie de connaître la suite. Là où 20th Century Boys m’avait laissé cloué avec des cliffhangers inoubliables, comme celui où on ne sait pas ce qu’il advient du héros, Billy Bat est peut-être un peu moins percutant à ce niveau-là.


Une œuvre plus sombre qu’il n’y paraît

Si je devais qualifier Billy Bat en un mot, ce serait : sombre. La série explore des thèmes complexes et parfois dérangeants. La chauve-souris elle-même, en tant que personnage central, peut être à la fois bonne et mauvaise. Mais lorsqu’elle est mauvaise, elle ne fait pas les choses à moitié. Ses actions n’ont pas de limites, ce qui donne à l’histoire un ton résolument mature. Ce n’est pas une série que je mettrais dans les mains des plus jeunes. À mon avis, il faut avoir au moins 12 ans bien tassés pour apprécier pleinement tout ce que cette série a à offrir.


Une porte d’entrée vers Urasawa ? Pas forcément

Si vous n’avez jamais lu Naoki Urasawa, je ne vous conseillerais pas forcément de commencer par Billy Bat. Non pas que ce ne soit pas une excellente série — elle l’est, sans aucun doute — mais elle est peut-être moins accessible que d’autres œuvres de l’auteur. Si vous cherchez une première série pour découvrir son univers, je vous recommanderais plutôt Pluto, Monster ou 20th Century Boys. Ces séries, plus directes dans leur narration, permettent de mieux appréhender le style unique d’Urasawa avant de se plonger dans une œuvre aussi complexe et mystique que Billy Bat.

Cela dit, pour les fans déjà conquis par Urasawa, Billy Bat est un incontournable. C’est une pièce maîtresse qui complète parfaitement son œuvre. Et si vous aimez le mélange de mystique, de manipulation et de grandes histoires entrelacées, alors Billy Bat est fait pour vous.


D’autres articles


Mis à disposition par l’éditeur : Non
Image de Manoloben

Manoloben

Enfant des années 80, joueur jusqu'au bout des doigts. Si vous retrouvez du Julien Clerc dans ce texte? Bravo! Amateur de RPG (tout type) et clairement fan de Sega. Manoloben reste un touche à tout. GP32, NeoGeo Pocket, N-Gage et aujourdhui Evercade sont passées dans ses mains.

Disponibilité

Age conseillé

Thèmes

Format

Editeurs/Auteurs

Pas d'anecdote

Avis sur
Billy Bat

👍Amusant👍

Billy Bat n'est pas une série comme les autres. Elle mélange habilement des éléments de fantastique, d'Histoire et de mysticisme, tout en restant fidèle aux thématiques chères à Naoki Urasawa. Avec ses 20 tomes, elle offre une lecture riche, profonde et souvent dérangeante, mais toujours captivante. Et même si elle n’est pas forcément la porte d’entrée idéale dans l’univers d’Urasawa, elle mérite amplement sa place parmi les grandes séries de manga. En tout cas, que vous soyez un fan de longue date ou un lecteur curieux, Billy Bat a de quoi vous surprendre. Alors, qu'attendez-vous pour plonger dans cet univers fascinant ?